«Orgueilleuse: c'était écrit sur mon dossier. La dame qui avait voulu m'adopter avait donné cette explication avant de me rendre à l'Assistance publique. Je n'avais pas quatre ans...»Suzanne a passé toute son enfance en orphelinat entre 1942 et 1956. Elle a failli mourir de malnutrition, puis elle a échappé à un grand-père pervers. Sa mère a été tondue en 1945. À cause de cela, les religieuses auxquelles l'Assistance publique l'avait confiée l'appelaient «bâtarde», «vicieuse», «tarée», et ( surtout et toujours ( «fille de putain». En livrant aujourd'hui ses souvenirs d'une orpheline pas comme les autres, elle fait surgir devant nous une petite fille pleine de feu qui oppose au malheur une arme dévastatrice: l'orgueil.Une religieuse en cornette qui fait réciter aux orphelines: «Ton père et ta mère tu honoreras.» Des messieurs bizarres qui prétendent tous au titre de «papa». Une épicière cossue qui rêve de rendre heureuse une petite pauvre. Une fausse grand-mère qui pleure mais abandonne. Une adolescente mystérieuse et scandaleuse. Une mère de dix-huit ans immature et criminelle... De personnage en personnage, d'aventure en aventure, Suzanne fait apparaître avec le sourire le seul élément stable de ces années d'abandon: l'absurde. Mettant à profit une mémoire exceptionnelle, elle se souvient des odeurs, des goûts, de la forme des robes autant que des insultes et des humiliations. Dans ce récit remarquablement écrit ou chaque chapitre peut se lire comme une petite nouvelle, l'auteur nous restitue avec talent l'atmosphère de la province des années 1940-1950. C'est aussi un document saisissant sur la vie quotidienne dans les orphelinats de l'après-guerre, un monde disparu plus proche du Moyen Âge que du XXe siècleSobre, poignant mais jamais mélo, «Orgueilleuse» est l'histoire d'une victoire sur le destin, la méchanceté et la bêtise humaine.
Suzanne Lardreau Livres


Terre de poche - 71: Orgueilleuse
- 277pages
- 10 heures de lecture
1944 : Suzanne n'a que vingt mois lorsque sa mère est accusée de trafic de cartes d'alimentation et de relations avec les Allemands. Une assistance sociale la prend en charge. Une femme qui avait voulu adopter Suzanne ne donne qu'un mot d'explication à l'Assistance publique quand elle ramène l'enfant à l'orphelinat : " orgueilleuse. " La fillette avait à peine quatre ans... Six décennies plus tard, la " bâtarde rebelle " revient sur ces années insensées et violentes dont elle est sortie victorieuse, échappant au destin tout tracé de bonne à tout faire ou fille de ferme que ses juges lui avaient préparé, par la force de son orgueil.